Interview d'Alix Deleporte - Ancien doctorant Septembre 2019
Alix Deleporte a récemment soutenu sa thèse à l'IRMA. Il a accepté de répondre à quelques questions.
Quel est ton parcours ?
J'ai fait mon Master recherche à l'université Paris-Sud, en tant qu'élève de l'ENS. J'y ai rencontré Nalini Anantharaman qui a accepté de me prendre en thèse, à condition que je la suive à Strasbourg ! Je suis donc arrivé à l'IRMA ou plus précisément à l'UFR Math-Info – puisque c'est là qu'est mon bureau – pour mon stage de M2. J'ai ensuite fait toute ma thèse à Strasbourg. À présent, je pars en post-doctorat (CDD de recherche) au MSRI (Berkeley) puis à l'Université de Zürich.
Quelles ont été tes actions à l'IRMA et à l'UFR ?
En tant que doctorant, j'ai été intégré aux activités de recherche à l'IRMA, et d'enseignement à l'UFR. Du côté IRMA, j'ai animé un groupe de travail pendant un an. Du côté UFR, j'ai enseigné en première et en deuxième année pour la licence Math-Info.
J'ai aussi eu la chance de pouvoir enseigner, aux côtés de Tatiana Beliaeva, au cercle mathématique de Strasbourg, qui rassemble des lycéens et qui a déjà fait l'objet d'un article dans cette Newsletter.
C'est dans ce cadre que j'ai co-organisé le TFJM^2 (Tournoi Français des Jeunes Mathématiciennes et Mathématiciens), une compétition mathématique pour élèves de lycée à l'échelle de la région Grand-Est.
Sur quoi porte ton manuscrit de thèse ?
J'ai majoritairement travaillé sur des problèmes aux valeurs propres pour des opérateurs qui agissent sur des sections holomorphes de fibrés. Quand la puissance du fibré tend vers l'infini, j'ai étudié les comportements asymptotiques, d'abord des espaces de sections, puis des opérateurs qui agissent dessus. C'est de la recherche fondamentale, mais qui est motivée par des exemples venant de la physique des spins, et qui j'espère pourra en retour nourrir la littérature physique.
Pour faire simple, j'ai diagonalisé des matrices !
Comment se passe la transition d’étudiant à chercheur ?
Ce n'est jamais une transition facile... J'ai eu la chance d'être soutenu par mon équipe de recherche, ce qui a permis que je ne me sente rapidement plus comme un étudiant. Mais ça ne veut pas dire que je n'ai pas des moments de doute sur mon avenir professionnel ! Chacun évloue à son rythme et je pense que le plus important est de parler aux gens et de se sentir à sa place.
Tu es également musicien amateur. Que penses-tu des liens entre mathématique et musique ?
À titre personnel, je vis surtout la musique comme un moment où je mets les mathématiques entre parenthèses -- et réciproquement ! Tel jour où rien ne marche dans ma recherche, la pratique ou l'écoute musicales me réconfortent ; tel jour où je suis frustré de ne pas arriver à jouer du basson comme je le voudrais, je peux me concentrer sur la préparation d'un cours. J'ai été très bien accueilli au sein de l'Orchestre Universitaire, ce qui m'a permis de tisser des liens notamment avec des enseignants et chercheurs d'autres disciplines. Cet orchestre cherche des musiciens et des musiciennes !
Beaucoup de qualités d'un musicien sont également des qualités d'enseignant ou de chercheur en mathématiques (écoute mutuelle, présence scénique, sens de l'organisation, originalité, compréhension de nouvelles notations, obstination...). Pour autant, je ne pense pas qu'être mathématicien m'aide particulièrement à mieux jouer. Les outils d'analyse harmonique (au sens musical du terme) nécessaires à la compréhension ou l'écriture d'une partition sont rudimentaires d'un point de vue mathématique. A contrario, la science des matériaux (et les outils mathématiques associés) a toujours servi la pratique musicale en permettant l'amélioration de l'acoustique des instruments et des salles, de Boehm à l'impression 3D.
Quels sont tes meilleurs souvenirs de tes années à Strasbourg ?
J'ai été profondément marqué par l'efficacité et la gentillesse du personnel administratif, tant à l'IRMA qu'à l'UFR. Je souhaite pouvoir retrouver une telle énergie dans la suite de ma carrière !
Parmi les moments que j'ai particulièrement appréciés, figure la naissance des canetons dans le patio de l'UFR. Tous les ans, une cane revient pondre au début du printemps. Et tous les ans, une effervescence s'empare du laboratoire ! La protection des canetons constitue d'un coup le sujet de discussion principal à l'UFR. Je pense que c'est une belle métaphore pour la mission première d'une université.